Christine Büring, nouvelle directrice du RI, souhaite bousculer certaines habitudes, renforcer le Rotaract et ouvrir le Rotary à davantage de diversité.
Madame Büring, c’est parti. Vous êtes désormais directrice du Rotary International pour l’Allemagne, la Suisse et le Liechtenstein pour deux ans. Quels sont vos objectifs pour ce mandat ?
Permettez-moi une précision : je suis l’une des 17 membres du conseil d’administration du Rotary International. Avec le président du RI et le secrétaire général, nous dirigeons l’organisation et veillons à ce qu’elle reste pertinente. Je représente donc à la fois le Rotary en tant qu’organisation mondiale, et les membres d’Allemagne, de Suisse et du Liechtenstein. Mon objectif est de maintenir un dialogue ouvert et transparent dans les deux sens, comme le demande le CoL. J’ai beaucoup de respect pour cette mission.
En tant que femme originaire d’Allemagne de l’Est, vous incarnez vous-même une forme de diversité.
Cela peut sembler marginal, mais c’est justement pour cela que nous devrions nous interroger sur la signification réelle de la diversité. Il est vrai que les femmes ne représentent que 16 % des membres du Rotary dans les pays germanophones. Le Rotaract, à ce niveau, est beaucoup plus avancé.
Je considère mes racines de l’Est comme une chance. Mon mari et moi avons cofondé notre club à Altenburg en 1995. Nous étions alors des femmes et des hommes dans la trentaine, avec des enfants, des professions… et un engagement au Rotary. Avant cela, j’ai beaucoup voyagé, ce qui me sert aujourd’hui, tout comme l’esprit d’initiative de l’après-réunification.
Je dirige une petite entreprise dans le tourisme. Là aussi, comme au Rotary, c’est une affaire de temps libre. Mes clients viennent pour un savant mélange de formation, de plaisir et de participation active. Il en faut aussi une bonne dose dans nos clubs.
Un de vos axes majeurs concerne le recrutement de nouveaux membres. Quelles sont vos pistes ?
La création de nouvelles formes de clubs a été une réussite ces dernières années. Nous voulons désormais cibler des groupes bien précis.
Avec le Conseil pour la diversité DACH, que j’ai lancé, nous explorons des pistes pour attirer des personnes exerçant des métiers peu représentés, des personnes issues d’autres milieux que la bourgeoisie académique habituelle, des jeunes, mais aussi des personnes en fin de carrière qui souhaitent s’investir autrement.
Tous les deux mois, nous organisons une session Q&A en ligne déstinée à de nouveaux membres. J’espère ainsi rendre plus tangible la diversité mondiale du Rotary.
Nous voulons convaincre par l’action, avec par exemple une compétition TEDx qui débutera en septembre et dont la finale aura lieu lors du DEUKO 2026. Il s’agit d’un partenariat d’égal à égal avec le Rotaract.
La transition entre Rotaract et Rotary, mais aussi le passage d’un club à un autre, sont essentiels.
Nous voulons valoriser le rôle des adjoints du gouverneur et, surtout, nous demander pourquoi nous ne sommes pas plus fiers d’être Rotariens. Qui dans notre entourage pourrait s’épanouir au Rotary, nous enrichir et donner du sens à son engagement ?
Vous avez élaboré un plan régional en amont de votre entrée en fonction. À quoi sert-il ?
C’est notre feuille de route pour les zones 15 et 16, une matrice simple, calquée sur les quatre axes du plan d’action. Nous y avons rassemblé des constats, défini des objectifs pour les deux à trois prochaines années.
Dans le cadre d'ateliers, nous avons évalué ce qui fonctionne déjà, ce qu’il faut simplement faire connaître, ce qui manque et où innover. Merci à tous ceux qui ont contribué à cette réflexion.
Nous avons également prévu des projets d’accompagnement, afin de proposer de nouvelles impulsions ou de tester des approches différentes. Il est très positif de constater que Rotaract et Rotary collaborent aujourd’hui sur un pied d’égalité dans l’équipe régionale.
Le Rotary est une organisation aux rouages parfois lents. Comment comptez-vous accélérer les dynamiques ?
Notre slogan est : Unite for Good. Écouter. Apprendre. Responsabiliser. Partager. C’est ainsi que je perçois le Rotary : un réseau de personnes engagées et intelligentes.
Nous voulons lancer des projets à petite échelle, les ouvrir à la discussion et les adapter aux réalités des clubs, districts et membres.
L’idée est de stimuler la collaboration et les échanges.
L’équipe de Claudia Hendry nous pousse à une vision holistique et à une évaluation continue de nos actions.
Comment comptez-vous toucher la base, ces membres silencieux dans les clubs ?
La base, ce sont tous ceux qui vivent le Rotary au quotidien. Il ne devrait pas y avoir de hiérarchie : nous sommes tous le Rotary.
La vie rotarienne n’est plus linéaire. Elle évolue. Ce qui convenait dans une phase de vie avec de jeunes enfants peut ne plus convenir ensuite. Le format, le rythme, les moyens, tout peut changer. Mais quitter le Rotary n’est pas une fatalité. On peut chercher une autre dynamique : dans un autre club, un groupe d’action, des rencontres en ligne, ou des projets internationaux.
Avec un peu de curiosité, sans crainte, et la confiance d’être accueilli partout comme "Fellow", je souhaite encourager cette mobilité et cette ouverture.
L’autonomie des clubs est précieuse pour beaucoup. Jusqu’où peut-elle aller ? Trop d’autonomie isole. Elle nous empêche de bénéficier du réseau. Sortir de sa zone de confort est au cœur de l’ADN du Rotary.
C’est un espace protégé : on peut oser. Toujours poser des questions.
J’invite toute la famille rotarienne à participer à nos MeetUps en ligne, chaque premier mardi du mois à 19h. On y abordera des sujets d’actualité avec des intervenants inspirants.
Quelle est, selon vous, la plus grande force du Rotary ?
C’est le plus beau réseau pour réunir des personnes désireuses d’agir, avec respect, équité et engagement, pour améliorer un peu le monde – et elles-mêmes.
Mettre en commun nos savoirs, nos expériences, nos contacts. Vivre de nouveaux apprentissages, partager, et tout cela à l’échelle mondiale : c’est un immense privilège.
Nous devons raconter davantage nos actions à travers des Rotary Stories.
Et ce qui devrait s’améliorer ?
Notre communication interne. Pourquoi ne pas répondre rapidement à une demande, chercher une solution, mobiliser un contact ? Par respect pour l’engagement de l’autre, ce serait plus efficace et plus agréable.
Je souhaite également davantage d’ouverture à des expériences communes.
Qu’il s’agisse d’événements de district, de séminaires, de rencontres en ligne, ou du FUSION Summit de septembre à Bruxelles, ces formats sont idéaux pour faire découvrir le Rotary et accueillir de nouvelles personnes.
Il s’agit de renforcer la coopération : entre clubs, entre districts, entre pays. Par exemple, avec l’Allemagne et la Suisse sur le projet du Ruban vert. Ou encore sur le thème de la diversité avec les pays DACH.
Et bien sûr, au niveau européen et mondial, avec des projets transfrontaliers, des RYLA internationaux, des ICC, ou encore avec la Fondation Rotary.
Le Rotary me remplit de joie.
C’est le plaisir de faire ensemble. C’est ce qui me motive, profondément.